19/5/2022

Danube (8) — Belgrade (Serbie) 2.

Classé dans: — Brigitte @ 22:16:04

         Nous quittons ce beau Musée National et, repassant par la Place de la République, nous prenons des rues animées et d’agréables jardins qui respirent le calme :

 

 

 

 

 

 

          Comme nous nous dirigeons vers le parc Kalemegdan, où se trouve la forteresse, nous trouvons, près de l’entrée, le « monument de reconnaissance à la France »

 

                                    

 

          Érigé en 1930 par le sculpteur Ivan Meštrović dans un style Art déco, il se veut un hommage du peuple serbe à la France pour l’aide qu’elle lui a apportée pendant la Première Guerre mondiale. C’est en effet l’armée d’Orient qui a récupéré l’armée serbe en 1915 pour la remettre sur pied et, à partir du front de Salonique, exécuter, à l’automne 1918, une progression victorieuse à travers la Serbie. C’est cet esprit de sacrifice et les liens très forts qui se sont noués à cette occasion entre Serbes et Français que Meštrović a voulu honorer. Sous plusieurs bas-reliefs de soldats français, il est écrit : « Nous aimons la France comme elle nous a aimés. »

          Nous arrivons à la forteresse.

 

 

                               Vestiges du mur romain de Singidunum

 

En raison de son importance, elle figure sur la liste des « monuments culturels d’importance exceptionnelle » de la République de Serbie1 et sur la liste des biens culturels de la Ville de Belgrade. L’actuelle ville de Belgrade s’est développée autour de la forteresse ; construite au début du 1er siècle avec des murs en terre, elle est devenue un castrum romain au IIe siècle, pui un château byzantin de vie au XIIe siècle. Capitale fortifiée du Despotat de Serbie du XIIIe au XVe siècle et fut occupée par les Autrichiens aux XVIIe et XVIIIe siècles. Elle constitue aujourd’hui un des hauts lieux culturels et historiques du parc de Kalemegdan et, plus généralement, de la capitale serbe.

La forteresse changea souvent de maîtres, conquise tour à tour par les Hongrois, les Bulgares et les Byzantins. Elle fit ainsi partie des terres de l’empereur Samuel Ier de Bulgarie et de ses successeurs jusqu’en 1018 puis redevint byzantine avant de passer aux mains des Hongrois, qui la conservèrent jusqu’au XIIe siècle. En 1127, le roi Béla la forteresse est offerte en cadeau à Béla II, pour son mariage avec la princesse serbe Jelena, ou Ilona (ou Hélène de Rascie), la fille de Stefan Uroš Ier. Béla II et son père Almos avaient eu les yeux crevés en 1115 pour s’être rebellés contre le roi Coloman (frère d’Almos). Mais, quand Béla II, aveugle, fut couronné roi de Hongrie après qu’Étienne II, succédant à Coloman, fut décédé sans postérité, Hélène prit les rênes du pouvoir et l’un de ses premiers actes fut de faire condamner et exécuter sous ses yeux les 68 seigneurs hongrois qu’elle accusait d’être responsables du châtiment de son mari !   Et, après la mort, dix ans après, de ce dernier, elle continua à régner sur la Hongrie. Cette jeune reine ne plaisantait guère avec les principes. Belgrade resta principalement une terre hongroise, sauf entre 1282 et 1319.

Puis la citadelle fut assiégée par les Turcs, trois fois, avant d’être emportée en 1521 par Soliman le Magnifique. Les Autrichiens s’en emparèrent en 1688 mais elle fut reprise par les Turcs deux ans plus tard. Et ce fut un aller-retour incessant jusqu’au jour où la Principauté de Serbie devint complètement indépendante de la Sublime Porte en 1868 et, à cette occasion, le prince Michel Obrenović reçut symboliquement des Turcs les clés de la forteresse….

Depuis la citadelle, on peut admirer un panorama magnifique sur la ville et le confluent du Danube et de la Save. (Vous pouvez obtenir les images en plein écran agrandissables d’un clic dans une autre fenêtre en cliquant sur les photos)

 

          Pobednik (en serbe cyrillique : Победник), en français Le Vainqueur, a été érigé en 1928 dans la Haute ville de la forteresse de Belgrade à l’occasion de la célébration du dixième anniversaire de la percée du front de Thessalonique.

                                                 

     Le monument est constitué d’une figure d’homme portant un aigle dans la main gauche et l’épée abaissée dans celle de droite. Œuvre du sculpteur Ivan Meštrović, sur un socle en forme de colonne dorique creusée de cannelures sur une haute base cubique, de l’architecte Petar Bajalovic1. L’aigle représente l’accueil chaleureux d’un peuple qui accepte les étrangers, mais l’épée signifie que quand même les Hongrois sont accueillants, ils savent se venger de la trahison, et n’ont pas vocation à se laisser écraser…

          Un peu plus loin, au-dessus de l’église Ružica, des ouvriers turcs œuvrent à la restauration des fortifications de la citadelle… Ironie de l’histoire… ;-)

       En descendant, nous découvrons, dans la partie basse, l’église Ružica ("rose", en serbo-croate), qui est l’église la plus ancienne de la ville, et qui a subi de nombreuses vicissitudes au cours de son histoire. Transformée en mosquée en 1521, l’église fut tour à tour en possession des Turcs, des Hongrois, des Autrichiens… Au XVIIIe siècle, le bâtiment servait de poudrière. Et en 1867, après le prince Obrenovic eut reçu les clés de la forteresse de Belgrade, le bâtiment fut rénové et consacré à nouveau - cette fois en tant qu’église de garnison. C’est alors qu’elle reçut le nom de Ruzica. Mais ses malheurs ont recommencé lors de la Première Guerre mondiale, où elle fut pratiquement détruite. Reconstruite ensuite par les artisans de Kragujevac qui lui ont fabriqué trois lustres uniques composés de sabres, de baïonnettes, de douilles, d’obus d’artillerie, de pièces de fusils et de pièces d’armes légères en souvenir de la Grande Guerre.

                                     

Devant l’entrée de l’église, deux sculptures ont été installées - le roi serbe Stefan Dušan en armure de l’époque de la bataille du Kosovo et un fantassin des guerres des Balkans qui ont précédé la Première Guerre mondiale.

Une vue d’ensemble de la citadelle, depuis le bas de la ville pendant que nous rejoignons le navire, avant le repas du soir, pour ressortir plus tard, pour le spectacle vespéral.

À 20 heures, nous avons un spectacle folklorique où nous pouvons assister à un florilège de danses serbes, certaines ayant des accents typiquement orientaux.

        Ci-dessous une vidéo montrant des extraits de ce spectacle que vous pouvez, également, regarder en plein écran ou en “image dans l’image :-) :

    Il est temps de rentrer, le bateau va bientôt continuer son voyage sur le Danube. Nous quittons cette belle ville, toujours animée, dans la nuit.

          Demain, il fera jour… Et nous passerons les célèbres Portes de fer… Brrrrr !…

Danube (7) — Belgrade (Serbie) 1.

Classé dans: — Brigitte @ 19:05:12

                    En ce jeudi 19 mai, nous allons visiter Belgrade, capitale de la Serbie. Nous y arriverons vers 11 heures et débarquerons après le déjeuner, et après que les autorités serbes auront accompli les formalités de douane et police. Nous ne reviendrons que pour le repas du soir ; après quoi, une sortie est prévue pour un spectacle de danses folkloriques serbes, cette nuit.

À l’entrée du pays, la rive droite est croate, la rive gauche serbe. Mais, très vite, le Danube forme une boucle et traverse la Serbie vers le sud-est en s’éloignant de la frontière croate et en se rapprochant de la frontière roumaine. Cette région est charnière, car elle marque le passage entre l’Europe centrale et l’Europe orientale. Par sa situation, elle fut longtemps la convoitise des différents empires romains, byzantins, ottomans, austro-hongrois, etc. Elle porte encore les stigmates de cette situation, cette mosaïque culturelle étant à l’origine de discordes, qui ont entraîné des conflits, certains assez récents.

La ville portuaire d’Apatin est la première cité de moyenne importance que nous rencontrons après la frontière. Plus en aval, le fleuve passe Novi Sad , dont les ponts ont été gravement endommagés en 1999 lors de la guerre du Kosovo. Nous visiterons cette ville au retour de notre croisière. Pendant plus de six ans, la circulation entre les deux parties de la ville s’est effectuée à l’aide d’un pont flottant de fortune perturbant la navigation sur le fleuve. Le nouveau pont appelé Pont de la Liberté a été inauguré le 11 octobre 2005. 70 kilomètres plus loin, le Danube atteint Belgrade, la troisième plus grande ville riveraine du fleuve avec 1,6 million d’habitants. Elle est construite autour du confluent de Danube avec la Save et son centre est dominé par l’imposante forteresse Kalemegdan.

Étape aujourd’hui importante du canal Rhin – Main – Danube, le port de Belgrade se trouve sur l’axe fluvial le plus important d’Europe, qui mène des navires de grand gabarit de la mer du Nord à la mer Noire.

Elle draine, également, un important trafic depuis l’Europe centrale vers les confins orientaux des Balkans. La route de Salonique, d’Istanbul et de Sofia passe ainsi nécessairement par Belgrade. C’est pourquoi l’Union européenne a choisi de faire passer le Corridor 10, ensemble de voies autoroutières et ferroviaires de première importance, par la région de Belgrade.

          Belgrade (j’emprunte, ici, des éléments de Wikipedia, repris un peu partout) est l’une des plus anciennes cités d’Europe, avec une histoire qui s’étend sur plus de 7 000 ans. Selon les historiens, on évalue la destruction de la ville entre 28 et 33 fois, sa position stratégique en Europe faisant, à la fois, son bonheur et son malheur, d’où les vers du xve siècle de Constantin le philosophe, « Pleure ville blanche, le noir de tes deuils ». Les premières traces de présence humaine dans la région remontent à la Préhistoire et à la culture de Vinča. Elle a été la cité de Singidunum, colonie romaine située dans la province de Mésie. Le nom slave Beograd apparaît pour la première fois le 16 avril 878, dans une épître envoyée par le pape Jean VIII au prince Boris Ier de Bulgarie. Il signifie la « ville blanche ». Au fil de son histoire mouvementée, la ville a été conquise par quarante armées : elle fut, tour à tour, romaine, byzantine, hongroise, serbe, autrichienne, ottomane puis capitale de la Serbie officiellement indépendante de la Sublime Porte en 1878.

                    Je donnerai, au fur et à mesure de ma visite, d’autres éléments historiques se rapportant aux monuments et œuvres que j’approcherai ou visiterai. Pour l’heure, j’ai très envie de me rendre, en passant par la ville, au Musée national, situé en son cœur et qui, outre un panorama complet de l’archéologie et de l’art de la Serbie, est réputé posséder une très riche collection de peintres impressionnistes, en particulier français… Il a été rouvert en juin 2018, après quinze ans de travaux de rénovation.

          Nous montons par une rue pittoresque, aux pavés irréguliers :

et parvenons au centre par des rues et places fort animées (il est aux alentours de 13h 30) :

          Ce restaurant souhaite la bienvenue au Français ! ;-)

                    La Place de la République (Трг Републике) est l’un des quartiers les plus vivants de la capitale.

C’est, aussi, là que se trouve le musée que je cherche, non loin de la statue à cheval du Prince Michel

C’est une œuvre en bronze du sculpteur italien Enrico Pazzi, qui représente le prince à cheval. Il fut érigé en 1882 pour célébrer le départ définitif des Turcs en 1867. Jusqu’à cette date, sept villes étaient encore occupées par une garnison ottomane ; leurs noms sont gravés sur une plaque apposée sur le piédestal de la statue. Le monument est aujourd’hui classé. D’après certains Belgradois, sa main (voir photo précédente) montre aux Turcs la direction du retour à Constantinople. Le prince Michel joua un rôle important dans l’autonomie de la Serbie.

                    Pour entrer dans le Musée, il me faut toquer à la porte. Un monsieur, fort aimable, nous ouvre et nous tend deux billets. L’entrée est gratuite et l’on peut photographier sans problème. Mais je ne puis me rendre directement au 2e étage, où se trouvent les pièces maîtresses (Tintoret, Renoir, Impressionistes). Il faut obligatoirement commencer par le bas…

                                        

         La photo suivante montre l’immense tableau de la Proclamation de la loi de Dušan, qui a une belle histoire :

La proclamation du codex de la loi de Dušan (en serbe : Проглашење Душановог законика , Proglašenje Dušanovog zakonika) est le nom donné à chacune des sept versions d’une composition peinte par Paja Jovanović qui représente Dušan le Puissant présentant le premier codex de loi de Serbie à ses sujets, en 1349. Le gouvernement royal serbe commanda la première version pour 30 000 dinars en 1899, dans l’intention de la présenter à l’Exposition Universelle de l’année suivante à Paris

Lors de sa commande initiale, le tableau devait représenter le couronnement de Dušan en 1346 en tant qu’empereur de Serbie. Après avoir consulté le politicien et historien Stojan Novaković, Jovanović a décidé de ne pas peindre une scène du couronnement de Dušan et a choisi de représenter, plutôt, la proclamation de son codex de lois. Jovanović a accordé une grande attention aux détails historiques, visitant plusieurs monastères orthodoxes serbes médiévaux au Kosovo et en Macédoine, étudiant les costumes et les armes médiévales et consultant des experts sur la période. Stefan Dušan était, en effet, l’un des dirigeants les plus puissants de Serbie. Au milieu du XIVe siècle, il a participé à la création d’un grand État serbe qui s’étendait du Danube au continent grec. En raison de son œuvre historique, il est appelé Dušan le Puissant ou Dušan le Législateur.

La première version a été achevée à temps pour l’Exposition universelle, où elle a été largement saluée par la critique et a reçu une médaille d’or par le comité artistique de la foire. Il jugeait, alors, cette peinture à égalité avec les œuvres des plus grands artistes du monde. Un certain nombre d’historiens et de critiques d’art considèrent La Proclamation du codex de la loi de Dušan comme l’une des plus belles œuvres de Jovanović, et Jovanović lui-même a estimé que la peinture était « sa plus belle composition ».

           Quelques tableaux de notre 2e étage de ce musée très riche :

                de Beta Vukanović (1872-1972), connue, également, sous le nom de Babette Bachmayer, et mariée au peintre impressionniste Rista Vukanović, qui eut une grande influence sur l’évolution de la peinture serbe.

                de Boža Ilić, 1948.

                de Marie Laurencin (1883-1956)

                de Maurive Utrillo (1883-1955)

                    

                Marie Laurencin, encore

                            

                    

                de Camille Pissaro (1830-1903)

                                             

                marbre de Giuseppe Croff (1810-1869)

                de Canaletto (1697-1768)

                              

                1930, Portrait d’Anne, d’André Lhote (1885-1962)

          Nous quittons le musée en revenant sur la place. Il nous reste beaucoup de belles choses à voir… Je me rendrai, tout à l’heure, à la forteresse Kalemegdan, site dont l’histoire est très riche, et dont j’évoquerai quelques événements dans le prochain article, toujours consacré à Belgrade. :-)

=====> Pour ce second article, le lien est celui-ci (cliquez)

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