21/5/2022

Danube (10) — Roussé (Bulgarie)

Classé dans: — Brigitte @ 17:44:25

          En ce matin du samedi 21 mai, nous faisons escale à Roussé, en Bulgarie.

          Roussé (Ruse ou Pyce), ville de 180 000 habitants) est l’un des plus grands ports de Bulgarie, le plus grand sur le Danube, et la capitale du Nord. Le pont au-dessus du Danube, Dunav Most, assure la jonction terrestre avec la Roumanie par un poste-frontière gigantesque, avec la ville roumaine de Giurgiu. On dit que Ruse est la ville la plus européenne de la Bulgarie. C’est un savant mélange de cultures bulgare, roumaine et autrichienne. La place principale est magnifique, le centre-ville est vivant, moderne, et d’une architecture très esthétique. Au XIXe siècle, ville cosmopolite, marchande et intellectuelle, Ruse fut la porte de l’Europe pour la Bulgarie. Elle était surnommée la Vienne de l’Est.

C’est la quatrième ville de Bulgarie. Elle s’appelait, Roustchouk (son nom turc), jusqu’à l’indépendance de la Bulgarie en 1878. Son patrimoine architectural rappelle, de manière quelque peu nostalgique, une Bulgarie danubienne de la « Belle Époque ».

                            

                                Place et Monument de la Liberté

« L’Europe, c’était le reste du monde. Quand quelqu’un remontait le Danube vers Vienne, on disait : il va en Europe ; l’Europe commençait là ou finissait l’empire ottoman ». Elias Canetti (1905-1994), prix Nobel de Littérature, « La Langue sauvée : Histoire d’une jeunesse (1905-1921) »

            Des découvertes archéologiques ont permis d’établir que des hommes s’étaient installés sur ces lieux dès l’époque néolithique. Des populations thraces, d’origine indo-européenne, s’y établissent par la suite. Les Romains leur succèdent.

À l’époque où cet empire s’étendait jusqu’aux rives du Danube (provinces de Thrace et de Mésie), la cité-forteresse portait le nom de Sextanta Prista (Soixante navires) en raison, semble-t-il, de la présence de nombreux bateaux, les « pristes » de la flotte militaire romaine danubienne qui était chargée de protéger le Limes.

Les premières tribus slaves arrivent ensuite dans la région au Ve siècle. Les Turcs envahissent le second empire bulgare au XIVe siècle et conquièrent Ruse en 1388. Ils en font à leur tour un port pour leur armada militaire et la rebaptisent du nom de Routschouk (petite ruse en langue turque). La ville restera comme la Bulgarie sous la domination des Ottomans pendant près de cinq siècles…

                                Le Palais de Justice

                                Le Panthéon de la Renaissance

C’est un monument-ossuaire national des héros, tombés pour la liberté de la Bulgarie. Il a été inauguré le 28 février 1978 lors du centième anniversaire de la libération de la Bulgarie du joug ottoman. Lorsque le régime communiste se met en place, en 1946, un rideau opaque tombe brutalement sur les années de gloire de la « Petite Vienne » bulgare.

                                Le Théâtre National

L’atmosphère séduisante et décontractée de la ville, son patrimoine architectural comme le Théâtre National, la place de la Liberté, la place Alexandre de Battenberg, la cathédrale catholique Saint-Paul en style néo-gothique (1892), le Musée d’Histoire Régionale et son trésor thrace de Borino, le lycée et la bibliothèque, l’église orthodoxe de la Sainte-Trinité (construite en 1632), la charmante rue piétonne Alexandrovska, la gare (premier édifice de ce genre en Bulgarie construit en 1866), ou encore la promenade sur le Danube, reflètent un savant mélange cosmopolite d’ambiances, de cultures et d’influences occidentale et orientales.

Certes, François Maspero n’est pas aussi enthousiaste que Canetti, qui décrit, ici, je cite : « une impression ténue de désastre irrémédiable […] dans des parcelles de temps décomposé [ …], un catalogue de l’architecture du siècle dans toute la splendeur de ces médiocrités successives » (sic)

          Et il est vrai que l’on déplore des restes de l’architecture stalinienne massive de l’après-guerre, et des immeubles encore habités, mais bien délabrés :

          Cela dit, je tente d’apprécier dans l’instant les beautés qui me sont offertes…

          Et ce banc de construction assez particulière rappelle, en ses inscriptions bulgares, que cette ville a été la première en beaucoup de choses :

Par exemple, on y avait fondé la première gare de Bulgarie, et on inaugura en 1866 la première ligne de chemin de fer de l’empire ottoman reliant Ruse à Varna. C’est à Ruse qu’ont lieu les premières séances publiques de cinéma et que sont fondées la première maison d’édition et la première compagnie d’assurances de Bulgarie, etc.

          Nous voilà devant la charmante cathédrale orthodoxe de la Sainte Trinité (Sveta Troitsa Cathedral). Datant de 1632, et reconstruite à plusieurs reprises, cette superbe église s’inspire de l’architecture russe, mêlant façade baroque, et intérieur de style médiéval.

                                     

Cette pseudo-basilique a trois nefs de 31,20 m de long et 15,60 m de large. Deux rangées de sept colonnes séparent les nefs. Elle a été creusée à quatre mètres et demi sous le niveau de la cour en raison des exigences des autorités ottomanes. Les vestiges de catacombes, datant peut-être du Ve siècle, sont situés dans l’angle sud-ouest du temple. Pendant la domination ottomane, il était plus facile de délivrer une autorisation pour la construction d’une nouvelle église à l’emplacement d’un temple plus ancien. Les chrétiens de Ruse ont vraisemblablement utilisé l’ancienne catacombe pour construire l’église.

Nous nous promenons à travers la ville :

Et nous visitons la jolie petite église orthodoxe St Nicolas :

Puis l’église catholique Saint Paul. C’est dans cette église catholique que se trouve ce qui fut le premier orgue bulgare, datant de 1907. Elle fut érigée en 1890 dans le style néoclassique d’après les plans de l’architecte italien Valentino. Elle se trouve, par ailleurs, proche du Danube, ce qui lui confère une position remarquable, et nous permet de nous rapprocher de notre bateau, où nous devons déjeuner vers 13h 30. Un bel édifice qui se démarque des autres églises orthodoxes :

                                

                                

           Pendant que nous déjeunons, notre navire quitte le port pour filer vers le delta du Danube que nous atteindrons demain matin et que nous nous réjouissons de visiter en petit bateau. Pour l’heure, il ne me reste plus qu’à attendre et admirer, sur le soir, les feux du coucher de soleil sur le Danube…

                                    

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