28/2/2009

Conclusion du voyage – Le sourire de l’Inde

Classé dans: — Brigitte @ 22:00:00

                     J’ai parcouru des villes, traversé des villages, visité des demeures, depuis les plus riches palais, jusqu’aux humbles abris de pêcheurs. J’ai rencontré des gens pleins de gentillesse, tout prêts à vous aider. Tous vous font don de leurs magnifiques et réconfortants sourires, illuminant des visages burinés.

                    J’ai admiré des temples aux fines dentelles de pierre, aux milliers de personnages sculptés que le soleil couchant faisait ressortir et animait et qui rendaient encore plus vivant tout ce monde prêt à danser, jouer, aimer, prier…

                    Et ces palais majestueux érigés dans des plaines arides, reliquats des fastes d’antan, je les ai explorés. Plus de princes, ni de maharajas, aujourd’hui, mais de longs couloirs, des salles, des escaliers, des terrasses, des peintures relatant d’anciennes épopées, des cours qui se succèdent où l’on imagine sans peine les éléphants parés, les serviteurs enrubannés ou les danseuses distrayant le maharaja au son d’un petit orchestre. A Vârânasî, où le temps est suspendu, les vivants remplacent les morts dans un cérémonial dont seuls le crépitement du feu et le murmure du prêtre viennent troubler le silence. Sur les ghâts, les femmes immergent, dans les eaux sacrées du Gange, leurs corps moulés dans des saris chatoyants. Les hommes invoquent le dieu, élevant, en offrande, leurs mains vers le soleil… Les vaches, ici, sont reines, et ces dames se promènent, sans se presser, à leur rythme, et, d’ailleurs, pourquoi ne pas se poser en plein milieu de la voie ?…. il est si bon de sentir le goudron chaud et les vapeurs de voiture ! ;-)

Les enfants sont parfois taquins et semblent toujours curieux de connaître votre nom et l’endroit d’où vous venez. Les mendiants attendent leur obole, vous chargeant d’un regard parfois difficile à supporter, mais vous bénissent dès que vous leur donnez la pièce. C’est l’Inde éternelle, mystérieuse et spirituelle, toujours égale à elle-même. Merci, ô Inde, de proposer, ainsi, à notre vie, une autre dimension, de l’éclairer de ton sourire, que le poète indien et prix Nobel Rabindranâth Tagore  a chanté dans un poème magnifique sur lequel je terminerai :

                    Le sourire de l’Inde

N’allez point le chercher dans l’atmosphère feutrée des hôtels luxueux,
Des palais des puissants, ou dans le cœur branché des métropoles.
Prenez plutôt les chemins sinueux des campagnes, à l’ombre des villages,
Sur les visages des faibles et des pauvres,
Dans la poussière immémoriale du travail recommencé.

La dignité de l’Inde
N’est pas de celle qui s’exprime en déférences et conformités,
En volutes respectueuses des usages et de la tradition.
Elle est dans le regard simple et droit des infirmes et des mendiants,
Dans les mélopées des aveugles, le long des trottoirs sous les abris de fortune,
Elle éclaire de sa présence le quotidien âpre des cités bidonvilles.

La richesse de l’Inde
N’est pas celle qu’empilent les nababs dans le secret des palais,
Ne découle pas de quelque manne boursière, ou de juteux capitaux.
Elle s’écoule en flot continu dans les jeux et les rires des enfants,
Dans leur énergie débridée et leur insatiable curiosité,

La force de l’Inde
Ne se manifeste pas en fierté militaire et défilés de grandeur.
Elle n’a besoin ni de politiques belliqueuses, ni d’idéaux malfaisants.
Elle gît dans les mains et les têtes des petits travailleurs et artisans
Dans leur savoir-faire ancestral, à la source de leur inépuisable talent,
En inventivité, débrouillardise, et autres recyclages ingénieux.

La beauté de l’Inde
N’a pas pour unique domicile les salons des musées, les façades des temples,
Elle ne s’exprime pas seulement dans l’art des musiciens, des danseurs, des yogis.
Elle est partout présente, dans le son d’une cloche, la lumière d’un matin,
Là où on ne l’attend pas, un ravissement de l’instant,
Elle est la trame invisible où se nouent les choses, les êtres, les événements.

La souffrance de l’Inde
Sachez la tutoyer tout en la respectant, car elle est un miroir pour l’humanité.
Ne l’enfermez pas dans un carcan de sentiments, de vertus, de jugements.
Elle vient se briser en vagues tumultueuses sur des rivages inexplorés,
Et ce sont, étrangement, par quelque énigme magnifique et troublante,
Ceux qui la subissent le plus qui savent préserver mieux…
~ Le sourire de l’Inde.

      À un prochain voyage !…                                          Brigitte Rubat du Mérac

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